Je fais partie de ceux qui pensent que l'abominable crime commis par cette mère de 19 ans, désemparée, abandonnée par le père de son fils et vivant loin de ses parents, aurait pu pêtre évité si notre société fonctionnait autrement. Cette jeune maman a sombré dans une solitude qui a accentué sa détresse et qui l'a menée, dans un moment d'égarement sans doute, à priver de la vie ce qu'elle avait de plus cher au monde et à mettre sérieusement en péril sa propre existence. Aline a donc opté pour la solution la plus monstrueuse qui soit pour une mère : tuer son propre enfant parce qu'on ne peut pas l'assumer. Aline est une mère célibataire. De là surgit la question centrale de la femme, encore et toujours ; cette femme qui assume la charge quotidienne des enfants dans la quasi-totalité des cas. Un travail très utile mais silencieux et qui n'est absolument pas reconnu. Pourquoi pas plus d'hommes pour ces tâches et pourquoi ce mépris de la société bien-pensante pour ce qu'elle nomme "la femme au foyer"? Pourquoi des hommes peuvent-ils abandonner ainsi leurs enfants en toute impunité ? Les services sociaux étaient-ils avertis de la situation de cette jeune fille et qu'ont-ils fait ?
Certains messages de détresse ont visiblement été envoyés par Aline qui n'avait plus de nourrice pour garder son enfant et qui risquait de perdre son travail si elle devait le garder elle-même. Aline a agi dans une situation de mise en demeure et de choix impossible. La seconde question se pose d'elle-même : tous les parents sauf ceux qui sont dans la sphère des hyper-privilégiés, sont invités à confier leurs bébés aux "autres" à partir de l'âge de deux mois et ce n'est pas de gaieté de coeur et sans traces que nous le faisons tous ou que nous choisissons de ne pas le faire. Tout ceci, bien-entendu, n'aurait pas été vrai si la pression du chômage n'était pas là puisque les couples choisiraient tranquillement l'option qui leur conviendrait sans avoir peur de l'avenir. Cette question du chômage est la troisième posée par cet apparent simple fait divers.
Combien de couples séparés ? Combien de drames familiaux ? Combien d'enfants malheureux engendrés par un système qui semble à bout de souffle ? Quel prix payé par notre société ? Aline semble loin des décisions politiques, des actions menées par les associations, les services sociaux, les services publics...et pourtant il suffit de décortiquer quelque peu cette situation pour en tirer de nombreux enseignements. et au même titre que les soldats américains qui vont en Irak risquer leur vie et assombrir celle des autres, ce sont les plus fragiles (comme Aline) qui sont les premiers à "plonger".
La France a besoin d'un changement profond, car comme pour les émeutes dans les banlieues, des drames de ce types sont certainement la conséquence d'une évolution dangereuse de cette société qui, de plus en plus, met "le marché" avant toute chose et qui perd les valeurs simples de solidarité et de citoyenneté.